Le 15 août prochain, le Congo va comme de nombreux autres pays africains célébrer le cinquantenaire de son indépendance.
Ici le constat peut être amer. Le Congo a eu bien du mal à trouver la stabilité et a connu le pire, violence, guerre civile, dont il commence doucement à se remettre.L’occasion aussi d’éclairer un des points qui structure l’ensemble de la société congolaise depuis cinquante ans, et qui explique encore bien les difficultés d’unité nationale, le contexte ethnique particulièrement compliqué (comme dans de nombreux pays africains d'ailleurs.
Au Congo, la majorité de la population est bantou soit une communauté linguistique présente dans plusieurs pays d’Afrique (Gabon, Soudan, Namibie) et qui rassemble 450 langues apparentées. Au sein des bantous congolais, on compte de nombreuses ethnies, au moins 74, réparties en différents groupes et dans différentes régions.
Il y a trois principales ethnies : les kongo, les tekes et les mbochis.
Au sud du Congo vit le groupe kongo soit grosso modo la moitié des 3 millions huit cent mille habitants du pays. Parmi les kongo, les laris habitant du département du Pool et de la région de Brazzaville sont majoritaires.
L’ethnie teke est la deuxième plus importante (20% de la population). Les tékés habitent dans le centre du pays, dans la région des plateaux au Nord de Brazzaville. Ils descendent des rois Tekes traditionnels, et bénéficie de la notoriété des voisins tékés gabonais : les principaux responsables politiques gabonais dont la célèbre famille Bongo sont tékés. Relativement marginalisés des cercles du pouvoir, ils gardent donc malgré tout une certaine importance.
Les mbochis sont le troisième groupe. Ils représentent 15% de la population et occupent la région de la Cuvette et le Nord du pays. Tous les présidents congolais depuis 1968 sont mbochis, excepté entre 1992 et 1997, quand le téké Pascal Lissouba était au pouvoir.
Aujourd’hui encore la solidarité ethnique constitue la base de l’organisation du pays. Dans la sphère politique, depuis les premiers pas vers l’indépendance, le paysage politique s’est structuré autours d’un conflit entre les ethnies du Nord et du Sud du pays. Dès la fin des années 50, Fulbert Youlou lari issu du Pool s’oppose à Jacques Opangault, mbochi des plateaux. Depuis 1968 et l’arrivée au pouvoir de Marien Ngouabi, le clan majoritaire au pouvoir (malgré cinq ans d’interruption) sont les mbochis de la Cuvette et des Plateaux, isolant les lari se Brazzaville et de la région du Pool.
De la même façon, la guerre civile de 1993 à 2002 opposait autant des personnalités et des clans que des ethnies du Nord et du Sud.La monopolisation du pouvoir par les mbochis, ethnie pourtant minoritaire, se ressent clairement dans l’organisation et le développement du pays. Les élites nommées par le pouvoir sont la plupart mbochis et choisis selon des critères ethniques. Les laris, à l'exception de quelques fidèles des différents présidents sont eux largement écartés des postes influents. Même chose pour le développement du Congo centré principalement sur le Nord du pays dont sont issus les mbochis. L’exemple le plus frappant est la ville présidentielle d’Oyo. Petit village rural à l'origine, Oyo se transforme en ville moderne, se dote d'hôtels, d'infrastructures démesurées par rapport au nombre d'habitants de la ville, et devient la véritable vitrine du pouvoir. Le Pool , pourtant la région la plus touchée par la guerre, reste quant à lui, livré à lui-même. Le brigandage qui s'y perpétue depuis la fin de la guerre civile en 97 semble s’exercer dans une relative indifférence.
Cette force centrifuge traverse l’ensemble de la société. La solidarité ethnique joue dans tous les milieux : notamment pour trouver un emploi, particulièrement dans les domaines exposés : médias…
Dans ce contexte, l’adhésion de la population au pouvoir et l’unité nationale est difficile à obtenir.
Pour certains Congolais, peut être manque-t-il également une figure historique tutélaire, dans laquelle chacun pourrait se reconnaître quelque soit son appartenance ethnique, à la manière d’ Houphouët-Boigny en Cote d’Ivoire, d’un Senghor à Dakar, ou même d’un Lumumba en RDC. Quelques intellectuels citent André Matsoua qui dans les années 30 joua un grand rôle dans le développement des syndicats, la dénonciation des abus coloniaux et la revendication d’autonomie pour le pays.
Seul problème, André Matsoua était lari.